Pérou #7 : marchons, marchons à Huaraz

// 27 mai – 03 juin 2018 //

C’est avec plaisir que nous passons du gris de Lima à la Cordillère Blanche de Huaraz, ville nichée au pied de cette chaîne de montagne aux sommets dépassant les 6000 mètres. Bon niveau bruit Huaraz n’a rien à envier à Lima, les rues étant un concert de klaxons permanent ! Mais ça va, depuis le temps on commence à être habitué et puis l’objectif n’est pas de visiter la ville mais bien ses alentours (oui Rémi, on va en faire des randonnées dans la montagne, t’inquiète !). On pose nos valises (celles qu’on a sur le dos et sous les yeux) à l’auberge Vacahouse qui sera notre base durant plusieurs jours. Pour cette étape nature, nous décidons de passer en mode déconnexion le temps de réaliser le défi de Robert qui est de rester 60h sans nos portables ni notre ordinateur, histoire de voir comment on se débrouille pour communiquer, se repérer et ne pas s’ennuyer ! (ici la vidéo du défi)

On commence notre exploration des lieux par la laguna Wilcacocha qui se trouve dans la cordillère… noire ! Eh oui il y a deux cordillères et pour apprécier la blanche il faut donc se rendre sur la noire ! Un collectivo plus tard, nous voici au départ du sentier qui monte pendant une bonne heure et demie à travers des petits villages de campagne où les habitants nous indiquent à chaque fois gentiment le chemin. Arrivés à la laguna, Rémi est un peu déçu car les nuages masquent la vue sur la cordillère blanche, mais les reflets dans le petit lac donnent une jolie atmosphère à ce lieu caché. Le retour à Huaraz dans un collectivo plein à craquer est épique, on a compté, nous étions 26 pour une capacité maximale de 18 ! Comme nous ne disposons pas de téléphone nous n’avons donc pas de réveil, on demande alors au gérant de l’hôtel de nous servir d’alarme humaine pour le lendemain car nous avons une excursion prévue avec un tour organisé à 8h du mat.

7h50, ça tambourine à la porte :
– « Heu, c’est vous qui avez un tour vers la laguna Paron ?
– [Rémi en caleçon après avoir sauté du lit en sursaut] Oui c’est nous !
– Le bus est là il vous attend.
– Mais quelle heure est-il ?
– 7h50 »

C’est donc en moins de deux minutes que nous nous levons, nous habillons, prenons nos sacs et courons vers le bus sans avoir pris notre petit dej ! Humains : 0. Technologie : 1. Quand on s’installe dans le bus Charlotte se met instantanément à dormir tandis que Rémi profite du paysage (en même temps il n’a que ça à faire !). Nous longeons la cordillère blanche et Rémi admire le Huascaran, plus haut sommet du Pérou avec ses 6768 mètres. « C’est plus haut que le Mont Blanc pas vrai ?! » sourit le guide qui nous accompagne. Près de trois heures plus tard nous arrivons à la laguna et grimpons jusqu’au mirador. On fait un peu les blasés car nous ne sommes pas emballés par la soi-disant grande beauté du lac, car une nouvelle fois les nuages sont de la partie. Avec du ciel bleu et du soleil, on pense que cela aurait tout changé ! Ce qui retient notre attention c’est le sommet en face de nous puisque ce serait celui qui a servi de modèle au logo de la Paramount (et non Rémi, ce n’est pas le Mont Viso !).

De retour à Huaraz, nous trouvons l’agence francophone Alpa-K, gérée par un Suisse qui nous explique ne pas prendre de gros groupes et surtout payer les guides à une rémunération équitable. Son discours nous séduit et on lui dit qu’on est prêt à attendre qu’un groupe se constitue pour partir en trek avec lui. Hélas, au bout de trois jours sans arriver à regrouper d’autres participants supplémentaires (mais personne ne veut aller en trek avec nous ?) on décide de changer notre fusil d’épaule et optons pour le séjour en autonomie avec deux nuits en refuge. Cette option plus « luxueuse » étant rendue possible grâce au sponsoring des parents Chabert (merci encore pour ce cadeau d’anniversaire !). Charlotte est un peu rassurée car l’idée d’être trois jours sous tente ne l’emballait totalement. « Mais moi je n’aime pas la montagne, je suis Rémi surtout pour lui faire plaisir ! » avait-elle lancé à l’agence histoire de planter le décor !

Pendant notre période d’attente, nous avons eu le temps de faire une autre excursion, cette fois-ci uniquement culturelle, au site de Chavín de Huatar. Comparé au Machu Picchu il ne reste vraiment pas grand-chose mais ces ruines-là ont mille ans de plus, du coup respect aux architectes ! Ce lieu est le vestige d’un centre cérémoniel datant de la civilisation Chavín entre 1200 et 200 avant JC. Historiquement le Pérou est alors dans ce qui s’appelle la période formative et donne naissance à l’institution des inégalités dans la société (parce que c’est notre projeeeeeeeeeeet !). Au sommet de Chavín, les prêtes chamans exerçaient une grande influence sur la population car ils étaient considérés comme des êtres supérieurs capables de communiquer avec les dieux, s’accaparant ainsi le pouvoir. Pour ce faire, ils utilisaient divers psychotropes dont le cactus de San Pedro pour rentrer en transe et accéder au domaine des divinités. Surtout, ils expliquaient aux populations qu’il fallait honorer les dieux avec des offrandes et des sacrifices (dont des sacrifices humains) afin que les récoltes soient bonnes. Sur place tout était fait pour impressionner les invités aux cérémonies, dont une grande partie se déroulait dans des souterrains. Bref, les chamans avaient tout compris, ils étaient vénérés tout en se tapant des trips ! Il est ainsi intéressant de noter comment avec un peu de religion ils ont réussi à créer une société où pour la première fois les inégalités sociales sont apparues. Ceci dit, leur ingéniosité dans la construction du temple et leur connaissance de l’astronomie sont remarquables pour l’époque. Tout se passait bien jusqu’à ce qu’El Niño (le courant chaud s’écoulant vers le Sud) arrive et ne détruise toutes les récoltes. Et contre ça les prêtres ne pouvaient rien. Les populations du coin cessent alors de croire en leur pouvoir, ce qui conduit à leur chute.

Le soir, nous avons fêté la fin de notre défi déconnexion en se jetant sur nos portables en allant manger à la « meilleure pizzeria du Pérou » conseillée par Guilhem et Stéphanie, un couple d’amis rencontrés à Colca. Il faut avouer qu’elles sont assez bonnes même si aucune ne détrône celles de notre copain Jorge d’Urubamba (et celles de Noailles ajoute Charlotte !). À Huaraz, on a également goûté à un « menu végétarien » avec du porc en entrée, véridique ! Nous avons maintenu notre forme physique en grimpant au mirador Rataquenua qui surplombe la ville et offre un aperçu sur les sommets enneigés, pour une fois bien dégagés (Rémi est content !). Bon, c’est bien beau tout ça mais si on est venus à Huaraz c’est pour marcher. Le lendemain, c’est le grand jour, on part enfin pour la montagne, la vraie. Direction la vallée d’Ishinca, l’une des plus belles de la cordillère blanche selon Bertrand de l’agence. On y accède d’abord par 1h de route dont une partie en piste bien cabossée (big up aux amortisseurs), ensuite c’est parti pour 4h de marche jusqu’au refuge. Le chemin monte tranquillement en passant par une très agréable forêt de quenuals, arbre endémique où Rémi y voit le décor digne du Seigneur des Anneaux.

On se pose près d’une rivière pour le pique-nique, le soleil est là, on est bien bien bien ! La suite est tout aussi agréable, on croise des chevaux et on joue tout le long du chemin à « repère en premier les petits bouts de tissus orange placés au bord du sentier ». Rémi l’emporte sur la fin 10 à 9 mais avec un système de calcul digne des comptes de campagne de Sarkozy (donc oui, Charlotte avait gagné en réalité !). On arrive enfin au refuge. Construit par des alpinistes italiens et géré par des volontaires du monde entier c’est l’endroit parfait pour se reposer. Il y a même de l’eau chaude, à 4000 mètres d’altitude c’est un luxe ! On apprend que l’argent des touristes sert uniquement aux villageois des environs pour construire des maisons et rémunérer les muletiers qui viennent livrer les provisions jusqu’ici. La devise : « Subir en alto para ayudar a los que estan abajo » (monter en haut pour aider ceux qui sont en bas). Le soir, on déguste le repas préparé par l’équipe avant de se réfugier dans nos lits, sous quatre couches de couvertures ! Finalement la nuit ne sera pas si froide et nous partons plein d’entrain à l’assaut de la laguna Ishinca située à 5000 mètres d’altitude.

Le chemin va piano piano ce qui permet de grimper sans presque s’en rendre compte, et sans avoir de problème à cause de l’altitude #acclimationbaby ! Le soleil mène un combat acharné avec les nuages et réussit à nous offrir quinze minutes parfaites lorsque nous arrivons au-dessus du lac, face à la paroi impressionnante du sommet Ranrapalca (6162 m) où nous enchainons les pauses photo devant ce paysage tout à fait grandiose. Nous avons l’impression d’être récompensés de nos efforts. Même Charlotte est conquise : « Une rando comme ça c’est très bien, avec un bon chemin pas trop dur et de beaux paysages ». Et ouais c’est ça la montagne pense très fort Rémi ! On retrouve le refuge avec le sourire, profitant d’un beau soleil pour faire une petite sieste dehors. Un peu plus tard, Rémi ne manquera pas d’assister au spectacle des derniers rayons de lumière qui enflamment la face blanche du pic Tocllaraju qui domine le refuge. Nous lions connaissance avec les volontaires, Martin et Queralt un couple de catalans en voyage en Amérique du Sud qui se sont posey ici il y a trois semaines. C’est leur dernier soir, pour l’occasion on leur offre la bière (oui on est généreux vu que c’est les parents Chabert qui régalent ! Ah merde, ils nous lisent ? Non mais vous inquiétez pas c’était pour la bonne cause !).

Pour notre dernier jour, le troisième, on se tente l’ascension vers… une laguna, bravo vous aviez deviné ! Quand on se réveille, on constate qu’il pleut et que le brouillard est de la partie. Nous allons quand même jusqu’au mirador du lac que nous apercevons quelques minutes avant que le gris reprenne ses droits et gâche tout le paysage. S’en suit la longue redescente, sous la pluie, jusqu’en bas de cette vallée qui décidément gagne à être connue (mais pas trop hein sinon Rémi ne sera pas content). On est fatigué, mais heureux. Ces trois jours en montagne nous ont fait le plus grand bien, comme le dit Rémi, la rando c’est bon pour le corps et l’esprit ! Nous nous reposerons de ces 44 kilomètres dans le bus de nuit qui nous emmène, après un mois et demi au Pérou, vers notre dernière étape dans le pays, le Nord et ses cultures méconnues.

4 commentaires

  1. Petit mot des sponsors : on note que notre argent a bien été utilisé 😉 Comme d’habitude on voyage dans le canapé ! Ce qui inquiète Gérard c’est comment il fera pour vous suivre cet été dans les Alpes du Sud !! Vous avez l’air d’avoir une sacrée forme.
    Il va y avoir beaucoup à raconter …. Bonne continuation.

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