// 02 – 04 juillet 2018 //
Nous y voici. La frontière redoutée, celle dont on dit qu’il faut près d’une journée pour la traverser. En cause, des files d’attente monstrueuses créées par l’afflux migratoire des Vénézuéliens qui ont fui leur pays et espèrent passer en Équateur. Comme il n’y a qu’un seul et unique bâtiment de chaque côté pour gérer les entrées et les sorties, on imagine facilement le bordel. Nous nous mettons à la fin d’une très très très très très longue file et achetons quelques gourmandises pour grignoter pendant ce qui s’annonce comme plusieurs heures d’attente. Jusqu’à ce que le vendeur revienne vers nous et nous demande :
« Vous êtes américains ?
– Heu, non on est français
– C’est pareil, allez à l’entrée du poste et passez devant tout le monde »
Nous voilà donc à l’intérieur dans notre file préférentielle avec ce sentiment bizarre d’être privilégié, même si nous comprenons cette séparation dont les raisons sont uniquement de l’ordre du pratique. Cela ne nous n’empêche pas d’avoir de l’empathie pour tous ces vénézuéliens dont leurs seules affaires tiennent dans une énorme valise et qui doivent s’armer de patience pour passer. Et encore, eux seront accueillis en Équateur, ce qui n’est pas le cas de bien d’autres migrants en Europe… En voyant cela on ne peut s’empêcher de penser aux personnes qui en France se plaignent d’une vague d’immigration qui est en réalité absolument dérisoire par rapport à ce qu’il se passe ici (et dérisoire aussi tout court par rapport aux capacités d’accueil de notre pays). Nos quarante-cinq minutes d’attente sont donc toutes relatives, d’autant que l’on ne mettra même pas dix minutes pour entrer en Colombie, toujours en évitant la file des vénézuéliens. On mesure donc notre chance, celle d’être passé rapidement, celle d’avoir un passeport français…
En Colombie notre première surprise c’est le change d’argent : des dollars nous passons aux pesos colombiens dont le nombre de zéros nous affole. Une bouteille d’eau coûte 3000 pesos, un billet de bus 63 000, va falloir jongler avec la money ! Du coup quand tu retires, tu as l’impression d’être millionnaire ! Notre taxi nous amène dans le centre-ville d’Ipiales, la bourgade la plus proche de la frontière. Nous sommes laissés sur une place où censément il y a plein d’hôtels. Non seulement on n’en voit pas mais une fois hors de la place on sent carrément qu’il va pas falloir s’attarder. Un homme vient nous confirmer cette sensation en nous demandant ce que l’on cherche car il vaut mieux éviter ce quartier. Il n’est pourtant que 16h de l’après-midi. On apprécie ce geste de bienveillance et on se réfugie dans l’hôtel repéré. Le temps de se poser dans notre chambre qui doit faire 5m2 environ on se dit qu’on pourrait changer nos plans et finalement partir dès le soir de cette ville rebutante. Ce sera donc visite express du monastère de las Lajas, superbement construit au-dessus d’une gorge étroite, et départ avec le bus de nuit pour Popayan. Oui, nous avons payé une nuit d’hôtel sans y dormir (heureusement pas chère !), mais au moins on a pu se doucher et profiter du wifi #petitsbonheursduvoyageur
Bon partir c’est bien un grand mot, car on a bien cru ne jamais pouvoir partir de cette ville, la faute à un gros micmac avec la compagnie de bus. On est d’abord monté dans un bus qui n’était pas le bon, pour cause c’était celui d’avant qui avait donc trois-quarts d’heures de retard ! On récupère nos sacs et attendons avec une trentaine d’autres personnes quand tout à coup le ton monte entre certains passagers et le vendeur de tickets :
« Comment ça vous nous avez vendu des tickets pour un bus qui ne viendra pas ?
– C’est pas de ma faute, tous les chauffeurs ont beaucoup roulé aujourd’hui, c’est jour férié je suis désolé.
– Désolé ? Mais attendez c’est moi qui suis désolé. Et ne me remboursez pas trouvez moi, trouvez nous un bus maintenant, on reste là !
– Ok, ok, un bus arrivera dans dix minutes »
Sont chauds les colombiens, faut pas leur vendre des faux billets ! Notre bus qui devait arriver puis fut annulé, entra finalement dans le terminal une demie heure après. On a même eu droit à des petites galettes gratuites, visiblement pas assez pour nos camarades de voyage :
« J’en veux pas de tes gâteaux, moi je veux un service à l’heure et qui fonctionne !
– [le chauffeur] : un peu de calme déjà je vous amène à bon port.
– Encore heureux, c’est pas gratuit tout ça ho ! »
C’est donc dans cette ambiance bon enfant (sic), clim à fond, sacs sur les genoux (oui, beaucoup d’histoires de sacs volés dans les bus donc depuis on est en mode mèfi) que nous passerons notre « nuit ».
On débarque à Popayan au petit matin, ville où les deux-roues font la loi comme si on était en Asie. Son centre historique lui doit le surnom de ville blanche mais en l’occurrence, aujourd’hui, jour de match de la Colombie au Mondial, la ville blanche est littéralement jaune ! Comme le dit si bien Charlotte la moitié de la ville porte le maillot jaune de la sélection et l’autre moitié va l’acheter. Il flotte une atmosphère typique des avants matchs aux abords d’un stade sauf que là, il n’y a pas de stade et le match se joue à des milliers de kilomètres en Russie ! Dans la rue tout est aux couleurs du drapeau national, des rétroviseurs des voitures aux vêtements de lama (quoi, les lamas aussi ont droit à des shirts). On va voir le match dans un centre commercial (conseil de l’office de tourisme, si si) où des dizaines d’écrans ont été installés. L’atmosphère est incroyable, tous les Colombiens se sont massés pour supporter leur sélection à grands renforts de vuvuzelas (RIP nos oreilles) et surtout avec une immense ferveur. On dirait qu’ils regardent la rediffusion du match où la Colombie aurait gagné la finale tellement ils sont à fond de fond. Chaque action du match, même la plus anodine, génère des réactions à la puissance sonore impressionnante. Ils vivent la partie intensément, et nous aussi, on se laisse embarquer par cette douce folie enivrante. Au moment du but de l’égalisation à la dernière minute, nous avons dit adieu à nos tympans, jugez plutôt :
Finalement, l’équipe colombienne perdra le match aux tirs au but, lors d’une séance qui nous a offert de belles émotions contrastées. Le silence qui a suivi le dernier tir au but adverse victorieux a été saisissant, certains Colombiens dépités s’en vont direct, d’autres se mettent à pleurer (Charlotte aussi, c’est dire la puissance communicatrice de cette énergie) tout en acclamant une dernière fois leur sélection chérie… c’est beau le foot quand c’est comme ça ! On est vraiment déçu pour les Colombiens, tant pis, on ne fera pas la fête avec eux, on ira se consoler en admirant un magnifique coucher de soleil en haut du Morro del Tulcan, une petite colline qui domine la ville, en savourant déjà nos premiers moments intenses passés en Colombie. On sent qu’on va se plaire ici !
coucou!c’était intense cette foule en délire!heureusement qu’il n’ont pas eu la coupe du monde!!je n’ose pas imaginer..
en tout cas c’est vrai qu’on se prend à l ambiance !
bonne continuation les petis et gros bisous
Coucou, au contraire on aurait bien aimé qu’ils gagnent pour vivre cette ambiance survoltée ! Gros bisous
Dommage l’élimination, j’aurais bien aimé une finale France – Colombie …. Comment auriez-vous fait ? 😁
On aurait été heureux dans tous les cas !