Chili #3 : des vallées et des merveilles

// 26 février – 4 mars 2018 //

Après 10h de bus depuis Valparaiso, nous rallions le village de Vicuña, dans la vallée viticole de l’Elqui connue pour le Pisco, l’alcool national. Enfin, disons bi-national car le Pérou le considère aussi comme « son » alcool. Et on pourrait dire match nul car le Pisco a été inventé dans ce qui aujourd’hui est le Nord du Chili mais était autrefois le Sud du  Pérou. Eh oui toi aussi apprends la géopolitique des frontières grâce à l’apéro ! Cependant la première boisson que nous goûtons est un « mote con huesillo », c’est à dire un mélange de jus de pêche et de… grains de blé. Le résultat est agréable quoique hyper sucré, un à deux nous suffira !

Dans la vallée le paysage est surprenant : les montagnes arides sont recouvertes de cactus et contrastent avec les nombreuses vignes vertes le long du lit de la rivière. Pour ces trois jours nous logeons en AirBnB chez Maria, une chilienne de 65 ans qui au premier abord nous semble difficile d’accès alors qu’en réalité son peu de communication s’avérera être plutôt de la timidité. Au fil des jours nous découvrons une femme indépendante et attachante qui est un peu devenue notre mamie à tous les deux ! 

Pour découvrir les alentours rien de mieux que le vélo ! Nous les louons auprès de la sympathique agence Elki magic tenue par un couple franco-chilien. Adeline nous fournir nos bécanes ainsi qu’une carte pour un tour de 18km. Et histoire de se donner du courage (et du carburant) nous commençons par la visite quasi obligatoire de la distillerie artisanale de Pisco où l’on en apprend plus la fabrication du breuvage (et en profitons our acheter une bouteille !). En guise de pause entre deux pédalages on goûte aussi un jus de cactus dans un resto solaire, pas mal du tout ! 

Le deuxième jour, nous allons en bus jusqu’à Pisco Elqui, un autre village rebaptisé ainsi pour attirer plus de touristes. Charlotte est intéressée à peu près par tout ce qui est proposé ici : massage ayurvédique, tarot, cosmologie andine, tours mystiques… Mais (heureusement selon Remi) nous sommes en début d’après midi et tout est fermé à cette heure-ci. Lorsque nous rentrons et que nous racontons notre journée à Maria, elle nous dit : « Mais moi je connais quelqu’un qui fait des massages, attendez je vais l’appeler ». Et voilà comment on se retrouve chez Johnny (c’est son vrai nom !) pour deux heures de massage en mode médecine chinoise. Ce gars a une histoire épatante, il était mineur (le Nord du pays compte pas mal de mines) avant d’avoir un grave accident au dos et n’a failli plus jamais remarcher à cause des multiples opérations subies… c’est finalement la médecine chinoise qui l’a sauvé et c’est pourquoi maintenant il veut transmettre ce qu’il a appris. Du coup ça se passe comme ça : il te touche le pied à des points très précis pour connaître les douleurs dans les autres parties de ton corps, puis vient ensuite le massage, plus traditionnel. On en ressort avec plein de bonnes ondes, ce qui nous permet d’être pris en stop pour rentrer alors qu’il faisait nuit et qu’on était un peu au milieu de nulle part ! 

Le lendemain nous disons au revoir à Maria et Tiger, son petit chat tout fou, pour faire étape à La Serena, ville soit disant agréable avec ses églises et son architecture coloniale, mais que nous avons très vite envie de fuir après s’être baladés dans les rues du centre, bondées de monde et de magasins. Rien à voir, circulez ! Ça tombe bien car notre but est de se rendre à Copiapo plus au nord pour aller au Parc national Tres Cruces proche de la frontière argentine. Mais l’endroit est difficilement accessible et seules des agences organisent des tours d’un ou deux jours à des prix exorbitants (genre comme une nuit d’hôtel sur les Champs Elysées, du moins on imagine). Seul moyen donc, partager une voiture de location. On sent que ça va être compromis, très peu de touristes se rendent dans ce parc, mais comme le monde est bien fait, surtout en voyage, on reçoit un message de notre hôte Airbnb qui nous dit qu’il y a un couple franco argentin qui loge aussi chez lui et qui cherche d’autres personnes pour aller ensemble au Parc ! C’est là que débute notre rencontre avec Sophie et Sebastian. Elle est française, lui argentin, elle voyage pendant un an, lui 3 mois et ils se sont rencontrés grâce à Couchsurfing. Nous faisons connaissance autour d’une / de plusieurs bouteilles de vin, ce qui nous donnera quelques maux de tête le lendemain ! On se dit que ce n’est pas l’idéal avant d’aller au Parc où l’altitude sera parfois à plus de 4000 mètres et surtout pour Charlotte qui va devoir conduire pendant les deux jours de notre expédition (mais peut être cela fera réfléchir Remi quant à l’éventualité de passer son permis ? Le suspense est entier…)

C’est donc à bord d’un pick up 4×4 que nous nous lançons à l’assaut des routes sinueuses qui nous font entrer dans un monde lunaire et désertique, où les roches prennent des couleurs ocres et où la présence humaine est quasi inexistante. Après avoir passé un premier col spectaculaire à plus de 4000 mètres d’attitude, nous rejoignons la Laguna Santa Rosa, un lac à moitié salé dominé par les cimes enneigées de la Cordillère des Andes. On se renseigne auprès du gardien de la Conaf (l’office des forêts chilien) qui nous dit qu’il y a un refuge où l’on peut dormir et qui est gratuit. C’est à une heure et demie de piste, Charlotte se remet en mode super pilote, et nous arrivons à cet endroit perdu au milieu de la caillasse juste avant la tombée de la nuit, non sans avoir traversé des paysages toujours aussi spectaculaires (enfin ça c’est pour les passagers car niveau conduite ce fut bien rude, note de Charlotte). Il n’y pas d’eau ni d’électricité, nous sommes seuls à 4200 mètres d’attitude, et le froid commence à envahir l’air. En tant que bon argentin, Sebastian nous réchauffe le coeur et le ventre avec un succulent rôti cuit au feu de bois, profitant de la grande cheminée du refuge. On est bien, bien, bien ! La nuit sera un peu compliquée à cause du froid et de l’altitude : un seul aller retour pour aller faire pipi te fait monter le rythme cardiaque comme si tu venais de faire un effort surhumain ! 

Au réveil le matin, c’est l’enchantement. Les montagnes se reflètent magnifiquement dans le lac tout proche, les couleurs sont fantastiques et les flamands roses paradent dans l’eau. Nous reprenons la piste pour monter encore un peu plus haut en altitude et atteindre la Laguna Verde, juste avant la frontière. L’endroit est insolite car il possède des sources d’eau chaude où l’on peut se baigner, le tout à 4400m d’attitude ! Charlotte super pilote apprécie grandement ce moment de relaxation. Nous retournons ensuite à la Laguna Santa Rosa pour passer la nuit dans un refuge gardé par Alvaro. Le maître des lieux est un souriant guide chilien avec qui on partagera quelques discussions. Là encore, c’est le grand kif, on a le refuge rien que pour nous et nous profitons de la superbe lumière de fin de journée qui donne à notre environnement des couleurs bleues et jaunes magnifiques. Nous passons une bonne nuit et c’est avec une pointe de tristesse que nous quittons cet endroit magique. 

Car le retour va faire mal : après 3h de route pour redescendre sur Copiapo, on apprend que nous devons rendre la voiture non pas à l’agence en ville (elle est fermée car on est dimanche !) mais à l’aéroport situé… 65 kilomètres plus loin ! Charlotte n’en peut plus et jette ses dernières forces sur le volant. On se plaint vivement auprès de l’agence de location une fois la voiture rendue, mais ils nous font le grand classique : « c’est géré à distance depuis Santiago nous on ne peut rien faire ». C’est donc éreintés que nous montons dans le bus que l’on doit prendre et payer pour rentrer en ville à Copiapo. Nous décidons de ne pas rester plus longtemps ici et c’est toujours à 4 que nous prenons la direction de San Pedro de Atacama. Au terminal de bus nous renforçons nos liens avec Sophie et Sebastian grâce à une partie de cartes dont notre argentin de Salta ressort vainqueur, mais il y aura d’autres parties plus tard… !